Posté le 03/10/2007 � 17:30
Lisez ça, ça résume très bien vers quoi on va:
"Imaginons que je sois un haut fonctionnaire de la santé. Imaginons que mon patron (le Président de la république ou peu importe) ait des désirs : avant tout être bien vu de la population. Il me demande de faire en sorte que tous les citoyens ne se plaignent pas (ou le moins possible) de leur système de santé et si possible au moindre coût.
Là je fait un état des lieux. J'ai 70 médecins dans le sud pour une demande de 100 et 30 (voire 15 dans certaines régions) pour la même demande dans le nord. Solution ? Simple : déplaçons les médecins du sud au nord. Ah oui mais il s'agit de politique et les médecins ont un gros secteur privé. Donc si je déplace mes fonctionnaires, les mécontents iront dans le privé, ce qui n'arrangera pas mes oignons.
Que faire ? Il y a une solution ? Mais oui bien sûr ... faire des médecins fidèles à l'hôpital publique. Qui comprennent le bien de tous ? non... qui sont obligés d'y rester. C'est là que viennent les ECN. D'abord c'est un examen national ... Comme ce n'est pas un concours tout le monde DOIT le passer pour être interne, et tout le monde DOIT être interne pour exercer. Et c'est là qu'est le coup de maître : mettre moins de place que de candidat aux ECN. D'abord faut pas que ça se voit (15 postes en 2006 et surtout une répartition sortie 5j avant la sortie au journal officiel du classement). On refait le coup en 2007 (déjà plusieurs centaines de postes manquants) et je vous l’assure d’avance que c’est prévu à plus grande échelle en 2008.
Ce qui doit arriver finit par arriver : des candidats aux ECN recalés 2 fois (malgré eux). Que vont faire ces pauvres carabins après leur 6 ans d’études-lavage de cerveau. Là l’administration les fidélisera : « bon vous n’avez pas vos ECN alors bon on peut pas vous permettre de vous donner le titre de Dr ou vous laissez vous installer. Mais comme vous êtes sympathiques on va tout de même vous laisser travailler avec des patients mais protégés par l’hôpital… En échange vous partirez où il y a besoin de médecins. Au moins vous ne vous marcherez pas sur les pieds. Bon vous êtes toujours libres hein… vous pouvez arrêter médecine aussi. »
Et voilà un souci de réglé. J’ai des médecins (pas chers sûrement d’ailleurs) et je les mets où je veux. Reste un souci… le remboursement des soins… y a décidément trop de médecins conventionnés. Faudrait faire un vrai secteur libéral pour ceux qui peuvent payer. Mais oui bien sûr : il faut les provoquer. On sort l’obligation d’installation pure et simple (à tous les coups ils vont se déconventionner). Et puis si jamais ça sent le roussi et qu’ils s’énervent trop (c’est qu’ils sont susceptibles ces médecins) on leur sort comme une faveur de n’obliger que les étudiants n’ayant pas réussi les ECN plusieurs fois. Si ça marche, on insiste un peu et les médecins libéraux trouvant ça intolérables se déconventionnent en masse.
Rappelons à toute fins utiles que nous ne sommes pas totalement sans arme. Nous avons la démographie. Avec de moins en moins de médecins pas remplacés, de plus en plus de vieux, la demande de soins va exploser. Même déconventionné, avec des tarifs aberrants, un médecin trouvera assez de patients pour vivre puisqu'ils seront découragés par les délais de la médecine « conventionnée ». De là viendra un simple constat : une médecine à l'américaine pour les riches et pour les pauvres ... médecine à deux vitesses... Mais je dois sûrement me tromper ... je ne vois pas qui en france pourrait adorrer un modèle pareil... ah si... et il est président (oups ).
Un des éléments de travail du projet de loi est de faire en sorte que dans les régions à (relativement) haute densité médicale les médecins ne puissent s'installer qu'en rachetant une clientèle. De facto, exercer deviendra un privilège avec un coût important et sera donc réservé aux fils de médecins (de la même manière que cela fonctionne avec les notaires ou les pharmacies) et les enfants ayant des parents fortunés. Car comment voulez vous qu'un médecin qui n'est pas payé suffisament pendant ses 10 années d'études, puisse à 30 ans (au moment de fonder/consolider une famille) s'endetter de façon astronomique pour son boulot. Rappelons que pour bien faire un autre projet de loi est en cours sur le fait que les médecins financent leurs études (ou du moins en partie). Comme aux USA...
Bref pour moi l’obligation d’installation est une atteinte aux libertés individuelle qui est tout simplement anticonstitutionnelle. On ne peut pas obliger des médecins libéraux à s’installer dans un endroit précis. C’est comme si on demandait à un marchand de poisson de s’installer en plein milieu d’une départementale (absurde). Ce principe ne doit pas souffrir une négociation quelconque qui serait la porte ouverte à quasiment n’importe quoi. Que ce soit pour plus tard, ou que ce soit sous un autre nom, l’obligation d’installation doit être REFUSEE EN BLOC.
Enfin une petite précision… ne nous y trompons pas le projet date d’il y a bien longtemps et Sarkosy n’y est pour rien… en tout cas quelque soit le candidat en place il aurait suivi.
Au fait une dernière précision ironique : Le rapport BERLAND sur la répartition démographique des médecins et les solutions à y applique a été fait par Mr Y. BERLAND … marseillais. Donc avec une mauvaise fois toute administrative ce rapport est forcément biaisé. Autre anecdote : le doyen de la fac de marseille était en colère de la dernière répartition pour la ville. On lui a rétorqué : « à marseille l’espérance de vie est supérieure de 8 mois au nord. C’est donc qu’il y a assez de médecins »…
Méditez cela amis carabins … et penser à demander une répartition des postes pour les ECN avant Janvier… Enfin je dis ça mais moi je suis déjà marseillais et ne serait probablement pas concerné par les réformes vu qu’en général il y a consensus pour qu’on ai le temps de s’y préparer (ça veut tout simplement dire sauver ceux qui ont déjà signé et sacrifier les plus jeunes). Je suis également comme la majorité d'entre nous, fils de médecin... Mais je sais regarder une situation avec du recul.
Ce qu’il faut retenir en 7 points :
1)L’ECN a été créé dans le but d’obliger les internes, y compris les généralistes à exercer dans les déserts médicaux, là où il y a le plus de postes
2)L’obligation d’installation a pour but d’obliger les médecins du secteur publique et du secteur privé, à exercer dans la zone où ils ont été internes, c'est-à-dire dans les déserts médicaux
3)Cette réforme touche ceux qui ont été et seront obligés de s’exiler de leur région d’origine pour être interne, qui ne pourront pas s’installer prêt de leur famille et en couple. Par exemple, comment va faire un couple d’internes séparé par l’internat (un à Paris, l’autre à Rouen) pour vivre ensemble une fois l’internat terminé ???
4)Cette réforme est une atteinte à un droit constitutionnel français ET européen : la liberté d’exercice sur le territoire français et de l’UE
5)Ce droit assure l’indépendance du corps médical devant l’état
6)Il faut donc refuser catégoriquement sans négociation toute mesure coercitive à l’installation, présente ou future
7)Il faut se donner les moyens pour ce refus : communication avec les médias, grève dure et réelle, information du publique car seuls ces moyens obligeront le gouvernement à changer sa position"