Posté le 02/05/2012 � 21:15
Qu'entends tu par fort different? Tu veux bien me faire un petit témoigmage de tes etudes et de tes stages? Ca m'interesse beaucoup!
La formation des psychiatres est, à l'heure actuelle, moins clinique qu'elle ne le fût auparavant, moins clinique que la formation des psychologues cliniciens (mais on ne leur demande pas la même chose non plus), plus axée sur le fonctionnement du cerveau (ce qui peut recouper la psychologie, mais pas que), sur la prescription (ce que ne fait pas un psychologue), et puis il y a aussi tout ce qui est paperasse lors d'une hospitalisation (lors des HDT, HO, HL, les comptes-rendus d'hospitalisation, c'est lui qui pose « officiellement » le diagnostic — non qu'un psychologue ne puisse pas le faire, il en a la formation mais les papiers, c'est toujours le psychiatre qui les remplit).
Je suis dans l'université qui est le plus orientée psychanalyse en France (Paris VII) : j'ai des cours de psychopathologie, de psychologie clinique, de psychanalyse, de neurosciences… Dans d'autres facs, ils ont de la psychologie sociale, de la cognitive, de la psychologie différentielle, des statistiques (enfin, plus que dans ma fac). On peut avoir aussi de l'éthologie, quelques UE de sciences humaines… J'ai eu de la sémiologie, je sais comment se fait une observation médico-psychologique, j'ai eu des cours de pharmacologie aussi sur les différentes classes de médicaments utilisés en psychiatrie : les circuits impliqués, les principes généraux d'action, les principes actifs, les effets secondaires, etc.
J'ai choisi jusque là de faire mes stages en psychiatrie : en unité fermée, en CMP, en CMPP, en hôpital de jour et en CAMSP. L'an prochain, ce sera en néonataologie et peut-être aussi en sénologie. (J'ai choisi de faire mes stages de M2 pro en médecine somatique.)
En unité fermée, le psychiatre avec qui je faisais mon stage menait les entretiens pour voir comment se portait le patient, juger de la pertinence d'un traitement, augmenter, diminuer, commencer ou arrêter, de la pertinence d'une hospitalisation ou pas… En CMPP, il s'agit plus d'évaluer où en est le patient (du moins dans celui où je travaille — car je suis aussi salariée en CMPP, j'ai fait mon stage dans un autre), de tenir compte des indications des différents professionnels (psychomotriciens, orthophonistes, psychologues, parfois éducateurs s'il y en a…) et de proposer des orientations (il peut être médiateur, en ce sens, avec le poids que l'on accorde à la parole du médecin). C'est aussi lui qui signe les papiers pour la sécu, qui fait parfois des ordonnances (assez rares en CMPP)…
J'ai vu des patients psychotiques, névrosés, des enfants, des adolescents, des adultes, des patients sourds, bientôt je vais tourner autour des problématiques de la natalité et peut-être du cancer… Le métier de psychologue permet de travailler dans des domaines peut-être plus variés que les psychiatres, mais ça reste encore à démontrer puisque l'on peut aussi trouver des psychiatres en médecine somatique.
Le travail d'entretien que l'on fait en tant que psychologue peut aussi être fait, mais généralement (du moins dans les services où j'ai été), le psychiatre s'occupe du traitement et le psychologue de la psychothérapie, ou du moins de faire des entretiens. Aussi parce qu'il est très délicat, pour ne pas dire impossible, de faire la thérapie et d'être aussi le prescripteur : ça peut donner sinon des angoisses pour le patient du genre « si je dis ça, il va me coller tel médicament, m'hospitaliser, etc. », ce qui n'est pas thérapeutique du tout ! il est bon de séparer les deux espaces même si psychologue et psychiatre ont à travailler la main dans la main. (Et ça, c'est assez difficile… parce que certains psychiatres sont très clairement méprisants à l'égard des psychologues, comme si on ne servait à rien. Et certains psychologues se veulent en permanence persécutés par des psychiatres… Bref, ce n'est pas toujours l'amour fou.)
Un psychologue n'est pas un personnel médical ni paramédical, et cette position extérieure est censée aussi lui accorder un autre type de regard et ouvrir d'autres possibilités de travail avec le patient.
Par contre, ce que ne peut pas faire le psychiatre et qui est notre prérogative exclusive, c'est les tests : tests psychométriques, projectives et autres. Il n'y a que nous qui sommes formés à ça. Ça peut être pour évaluer le QI, affiner la personnalité d'un patient (surtout en entreprise), affiner un diagnostic (but de certains tests projectifs)…
Sinon, pour les études de psychologie en général… le parcours dépend de certaines universités, de leurs orientations. J'ai la chance d'être à peu près sûre de rentrer en M2 pro attendu que je remplis les critères requis (normalement, on ne peut pas me refuser, tout au plus on peut me refuser le parcours que je choisirai). Dans ma fac, ne sont formés que des psychologues cliniciens, mais d'autres universités forment aussi des neuropsychologues, ou des psychologues formés en psychologie sociale, en criminologie…
C'est sûr que trouver du travail est difficile à la fin des études et que les études elles-mêmes ne sont pas toujours évidentes (en ce moment, c'est plus particulièrement compliqué de trouver un stage à cause de la loi sur l'égalité des chances, de son renforcement en juillet dernier et de l'application qu'en font certains, notamment à l'AP-HP pour ne pas les citer — ce qui bloque énormément la possibilité de trouver un stage) ; mais je ne regrette pas le choix que j'ai fait à l'époque (même si je pense quand même sérieusement à tenter de me réorienter en médecine, par la passerelle P2 et / ou la PACES).
Le gros problème des études, c'est le risque de se retrouver titulaire d'un M1 et de ne pas être pris en M2 pro… Et un M1 de psychologie ne sert à rien dans ce pays.
Il est aussi question d'une réforme des études et il est probable, voire à peu près certain, que, dans ma fac, je fasse partie de la dernière promotion titulaire d'un diplôme de psychologue à bac +5. (On parle beaucoup de doctorat d'exercice, dans un alignement aussi sur ce qui se fait en médecine, sans pour autant réduire la profession de psychologue à du médical ou du paramédical.)
Il y a du bon dans les deux métiers, et du moins bons dans les deux. Le côté un peu « contrôle social » que la psychiatrie peut revêtir (tout dépend comment on fait son métier) ne m'attire pas du tout et que je n'ai pas envie de devenir psychiatre juste pour signer des papiers d'HO, HDT, etc. Et il faut savoir que la psychiatrie peut servir à ça.
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Passerelle DFGSM2 2013
DFASM1.
Externe de l'AP-HP.