Posté le 20/05/2021 � 14:06
Bonjour,
Je ne peux pas temoigner sur un echec a la Passerelle vu que c'est ma premiere tentative cette annee, mais, pour ce que ca vaut, je peux temoigner d'avoir echoue 3 fois a une procedure competitive equivalente (peu de places pour plein de candidats, sur dossier + oral, criteres de selection aussi obscurs et arbitraires que la passerelle, selection tres probable a la tete du client/humeur du jury, 3 chances max par personne. Un domaine completement hors medecine mais aussi tres elitiste/competitif.) Et je peux temoigner que oui, ca fait mal, pour l'ego et aussi un sentiment d'injustice, mais on s'en remet et on tente autre chose. Je ne regrette absolument pas d'avoir epuise mes 3 chances, de meme que je vais utiliser mes 2 chances passerelle. Je sais que je me remettrai plus facilement d'un echec, qui permet de faire son deuil et passer au plan B, C, D, que du regret de me demander, a 65 ans, et si j'avais essaye, comment aurait pu tourner ma vie? Pour citer un "modele professionel" qui m'inspire a tenter la passerelle, Irvin Yalom, le psychiatre americain qui a plus ou moins "invente" la psychotherapie existentielle, il encourage ses patients/clients a vivre leur vie de maniere a avoir le moins de regrets possible.
Pour prouver que je n'invente pas une histoire bidon, je parle du Fresnoy, une ecole d'art super chic a Lille. Et oui, j'ai tente d'autres choses avant la passerelle, comme d'autres candidats tentent apres un echec pour entrer au CNRS. Certaines personnes revent de faire medecine depuis l'enfance, d'autres personnes changent de but avec l'age/l'experience, d'autres (c'est mon cas) on toujours eu un but professionnel "coherent mais abstrait" plutot qu'un but de metier precis, et tentent toutes les opportunites pour trouver un metier/emploi qui remplissent les criteres. Dans mon cas, c'est d'utiliser a la fois des competences scientifiques/rationelles/logiques mais aussi de faire un metier qui me permettent de porter un regard critique sur l'etre humain et la societe. Donc artiste, faire de la recherche interdisciplinaire, des sites internet pour des institutions culturelles, ou psychiatre, tous ces metiers remplissent mon critere, mais inge dans une entreprise du CAC40 ou une start up, non, mais il faut bien payer mes factures en attendant mieux (qui ne viendra peut etre jamais, j'en ai conscience, mais je ne veux pas me resigner par defaut. Je ne veux pas non plus tomber dans le piege d'oublier de vivre en attendant un futur hypothetique, donc j'essaie toujours de faire le plus de choses interessantes possibles en dehors du "travail alimentaire").
Pour le Fresnoy, a mon 1er essai, j'etais admissible mais tres clairement, j'ai echoue a l'oral par manque de confiance en moi. J'avais meme explique mon projet de maniere volontairement vague par peur que le jury prenne offense au theme queer (c'etait 2011, beaucoup moins visible en France), ca c'est retourne contre moi, mon idee apparaissant moins aboutie qu'elle n'etait. Il y avait aussi clairement une question de classe/sentiment d'imposteur, j'avais ete tres intimidee par l'environnement, c'est une ecole d'art mais tellement chic que leur expo de fin d'annee ressemblait a un musee. Je me suis bien rendue compte que j'avais echoue principalement par manque de confiance en moi, donc j'ai decide de vivre/faire des projets pour gagner en experience et maturite et de garder les 2 chances qui me restaient pour juste avant la limite d'age (35 ans). J'ai alors refait un dossier (presque identique pour les 2 dernieres tentatives car j'en etais contente) et objectivement, c'etait d'un niveau totalement superieur a mon 1er essai, bien plus reflechi. Ces 2 dernieres tentatives, je n'ai meme pas ete admissible aux oraux, bien que je sois 100% sure que mon dossier etait bien meilleur qu'a ma 1ere tentative. C'est contradictoire en apparence, mais je sais pourquoi: l'experience acquise en 7 ans etait certes considerable, mais le jury l'a evaluee par rapport a ce qu'une personne ayant ete artiste a plein temps pendant 7 ans aurait acheve. Or j'etais inge commercial la semaine pour payer mes factures, et artiste les soirs et week end. Donc forcement j'ai fait moins d'art qu'une personne ne dependant pas totalement de son salaire.
Je comprend l'amertume de se dire qu'il y a une part d'injustice/discrimination dans notre echec, pas juste des dossiers meilleurs: il y avait tres clairement des dossiers mieux que le mien, mais aussi des projets admis que je trouvait superficiels, et, parmis les admis francais, enormement de "noms a particule", donc des gens qui probablement n'avaient pas de probleme de boulot alimentaire. De meme que, parmis les admis passerelle d'annees precedentes, il y une personne qui pouvait se permettre de faire un stage d'observation non paye pendant un an. Je trouve ca legitime et sain d'avoir conscience du contexte social et des injustices, et de ne pas tomber dans le piege "meritocratique" de se dire qu'un echec est 100% du a nos capacites. Mais par contre, se torturer a ce sujet ou deverser du fiel sur les reseaux sociaux, ca ne rendra ni la societe plus juste, ni notre vie plus satisfaisante, c'est plutot, comme le dise les anglais "boire du poison en esperant que ce soit l'autre qui tombe malade". [et comment je compte survivre sans boulot alimentaire, que je sois prise au Fresnoy ou a la Passerelle, dans les 2 cas, rentrer chez ma mere et jouer les Tanguy fauches pendant la formation!]
J'ai conscience que ce post est peut etre un peu hors sujet, mais c'est vrai qu'il y a tres peu de temoignages de gens ayant echoue a toutes leurs tentatives passerelle, pour la bonne raison qu'ils font leur deuil, passent a autre chose et ne trainent plus sur remede. Il y a surtout des temoignages d'admis a leur 2eme tentative. Donc je voulais donner un temoignage honnete d'avoir echoue 3 fois a une procedure selective tout aussi arbitraire et prestigieuse, et de m'en etre remise et passer a autre chose.
Ce que je peux conseiller en cas d'echec generalement:
- ne pas tomber dans le piege d'etre obsede par la competition, ni lier son estime de soi a son emploi alimentaire, bien que la societe neoliberale et les reseaux sociaux font tout pour nous entrainer a faire ca. La majorite des gens super interessants que j'ai eu l'honneur et le plaisir de rencontrer ont un boulot alimentaire totalement banal et trouvent leur passion dans la vie dans des activites paralleles (culturelles, associatives, militantes). Certains font comme moi et essaient de trouver un emploi remunere plus enrichissant, mais ne reussissent pas, pour la triste raison que les emplois intellectuellement/socialement satisfaisant ET remuneres correctement sont tres tres rares (lire "Bullshit jobs" de David Graeber permet de relativiser). D'autres preferent un boulot alimentaire dans lequel il ne s'impliquent pas emotionnellement, qui leur permet de mieux compartimentaliser. Moi je crois fermement que la valeur d'un etre humain ne depend pas de comment cette personne gagne sa vie.
- saisir toutes les opportunites de faire des choses interessantes dans la vie
- reflechir a "les motivation de fonds pour lequelles on veut tenter la passerelle" et voir quels autres metiers ou activites pourraient correspondre. Moi je cherche "un melange de logique et de reflexion critique sur l'humain/la societe", ce qui m'amene pour l'instant ici apres mes 3 echecs Fresnoy (et d'autres echecs moindres
. Je crois me rappeler qu'il y a des gens qui vont travailler dans des starts up de biotech apres leur echec passerelle.
Bonne chance et bon courage a tous.
Mel.
PS: Pardonnez l'absence d'accents, je redige sur un clavier anglais.
Ça c'est du racontage de life qui sert à rien. .
Tu incite les gens à abdiquai la passerelle . C'est malsain .
Ensuite chaque expérience ait différent .
Certain ont plus de mal a tournait page a oublier leurs rêve .
C'est pas rage ni être haineu que de dire que tous n'a pas la même chance selon fac , profil , âge et même connaissance . C'est LA VIE , that it''s happen