Posté le 02/04/2013 � 00:06

La médecine c'est de la merde.
Un concours dans des conditions affreuses, pression psy, pas de place dans les amphis, compétition +++
Puis cours, examens, rattrapages, cours, examens, rattrapages, cours, examens, rattrapages, cours, examens, rattrapages...
Puis l'hosto: quasiment pas de formation (parfois même on se demande s'ils ne font pas exprès de faire de la rétention d'info !), et beaucoup de "QUOI tu sais pas ça ??....". Bravade, intimidation, roulages de mécanique des chefs, des chirs, des réas... Gardes dans des chambres pourries. Cours appris, oubliés, réappris, ré-oubliés... trop d'infos à mémoriser (pour nous les dinos en tout cas !) Incompétence à l'hôpital, rôle de subalterne, de spectateur, de punching ball pour le chef qui a envie de se défouler le matin... ranger les dossiers, aller chercher les scanners, faire des observations qui sont rarement lues et encore moins corrigées... gardes aux urgences péd / adultes / chir: tu entres dans le box et... quoi ? Tu dois faire quoi ? Pourquoi est ce que personne ne t'explique les choses simplement, modestement, humainement ? Tu as l'impression que tu n'es là que pour te faire casser. Tu as lu, appris, compris tes cours, mais le patient qui est dans le box des urgences a un truc qui n'est pas dans tes livres...
Gardes en gynéco: "fais l'échographie", mais on ne t'a rien montré, rien appris ! Tu demandes timidement: "heu comment on allume la machine ?" Ton chef de clinique est payé pour te l'apprendre, la clinique, mais il t'ignore... seul l'interne, si tu as de la chance, va te former, mais c'est déjà lui qui fait tout dans le service alors tu ne peux pas vraiment lui en vouloir... tu veux savoir palper un foie ? Apprends tout seul... oui ça, c'est ce que tu finis par comprendre au bout de qq années: PERSONNE ne t'apprendra rien... tu dois faire ta tambouille tout seul: de 19 h à 23 h dans les confs d'internat, ambiance de merde à Paris (c'est bien simple on dirait que 80% des étudiants viennent d'enterrer leur famille, on a envie de les secouer: "hé les gars, c'est juste un concours, hein, calmez vous !!"), dans des livres opportunistes sans âme, sans charme, sans intelligence, sans progression, sans élégance intellectuelle... uniquement obsédés par les ECN càd un bachotage brutal et répétitif, apprendre les fameux "mots clé", ceux qui "coteront" dans la grille de correction des ECN (où tu seras jugé selon ton classement: "bien classé = intelligent", "mal classé =...."). Oui parce qu'aux ECN, tu peux donner la bonne réponse, mais si c'est pas le mot clé coté dans la grille, tu n'auras pas tes points. Tu dois apprendre seul en stage, et mettre ton orgueil ou ta sensibilité de côté... oui tu te feras casser, mais tu t'en fous parce que tout le monde est logé à la même enseigne. Ouvre grand tes yeux et tes oreilles... observe ton chef, sa façon d'examiner... apprends les expressions, le vocabulaire... comprends comment fonctionne l'hôpital.. va en radio faire relire une radio du thorax... enchaîne les stages, choisis les bons, ne te planque pas trop...
Et puis... un jour, ou plutôt: certains jours, jour après jour, lentement mais sûrement... comme à l'insu de ton plein gré... tout commence à se mettre en place. Oh c'est d'abord un frémissement... un jour (à 12 mois des ECN, à 2 mois des ECN voire après les ECN pour d'autres peu importe), un jour tu te sens un peu mieux. Tu entres dans ce fameux box des urgences mais cette fois tu sais quoi dire à ton patient, comment l'examiner. Tu commences à prescrire des examens complémentaires, ou alors des petits traitements faciles, une gastro, un lumbago, un torticolis, tous ces petits bobos des urgences... tu commences à te poser les bonnes questions, et tu vois que ton chef se pose les mêmes. Les cours, tu les as lus, il te reste un petit cahier avec que les fameux mots clés mais qui ne sont pas si bêtes que ça, en réalité, car ils correspondent (tu t'en aperçois avec soulagement) à la vraie pratique du médecin du moins dans les grandes lignes. Tu commences à comprendre à quoi servent les ECN: à préparer les futurs internes de premier semestre, 1ère garde. Les confs ? Tu n'en as plus rien à faire, d'ailleurs tu les regardes désormais sur internet et tu chopes des cas cliniques un peu partout. Les révisions ? C'est plus agréable à deux car ça motive, ça distrait, ça échange des infos et ça réfléchit à deux. Tu n'es plus seul. Les stages ? Tu as fait depuis longtemps le deuil du fameux compagnonnage qu'on t'avait promis: désormais tu viens en stage avec plus de sagesse. Tes yeux et tes oreilles sont ouverts bien plus grands. Tu comprends enfin ce dont on parle. Tu sais faire une ponction lombaire, une ponction d'ascite, une biopsie des glandes salivaires, des gaz du sang, tu sais prescrire. Tu comprends qu'à l'hôpital tu n'es jamais seul. Il y a les autres, et puis il y a toutes les sources d'info, et internet dans ton téléphone. Tu es à la limite entre deux mondes... tu te mets constamment à la place de l'interne, tu critiques certaines de ses décisions.
Tu es prêt à devenir interne. La médecine, c'est pas de la merde. Tu vas être médecin. Tu as un peu peur, bien sûr, mais tu es fier.